Lecture 2019-22 : « L’île aux mille sources » de Sarah Lark

Séduit en début d’année par Les Rives de la terre lointaine (premier tome de la Trilogie Maorie qu’il va sans conteste falloir que je continue), je me suis laissé tenter par le premier volet de la nouvelle saga de Sarah Lark qui doit sortir le 5 juin prochain. Je remercie, d’ailleurs, Mylène des Editions de l’Archipel qui m’en a très gentiment envoyé un exemplaire. Pour cette nouvelle aventure, Sarah Lark nous fait encore une fois embarquer pour des terres lointaines mais cette fois-ci, il n’est plus question de la Nouvelle-Zélande et de son lot d’exilés (volontaires ou non) mais de la Jamaïque et son passé d’esclavagisme.

Rébellion à la plantation (4e de couverture)

Londres, 1732. Nora, la fille d’un riche négociant, a perdu Simon, son premier amour, avec qui elle rêvait d’horizons lointains. Pour satisfaire ses envies d’exotisme, la jeune femme accepte d’épouser Elias, un veuf bien plus âgé qui possède une plantation en Jamaïque.

Nora embarque alors pour les Caraïbes, à la découverte d’une île enchanteresse. Mais, bien vite, elle déchante : les conditions de vie des esclaves dans les champs de canne la révoltent. Décidée à faire évoluer les mentalités, Nora pourra compter sur le soutien de Douglas, le fils d’Elias. Mais la révolte gronde, qui pourrait bouleverser à jamais la vie de Nora.

Le destin d’une héroïne forte et déterminée

Première remarque : Sarah Lark nous propose encore une fois un roman d’aventures dans des contrées lointaines. Mais force est de constater qu’à la différence du roman Les Rives de la terre lointaine, l’intrigue ici se révèle beaucoup plus simple. Beaucoup moins de personnages et donc de destins et de péripéties entremêlées. Il semblerait qu’avec cette nouvelle saga, l’auteure cherche à conquérir un plus large public. C’est un choix, même si, pour cela, la recherche de la simplicité m’est toujours apparue comme une solution bien trop facile.

Il n’en reste pas moins que l’on ne s’ennuie pas. Et c’est en grande partie dû à l’ambiance historique choisie en fond d’intrigue. On se retrouve effectivement plongé dans la période de l’esclavage et l’on assiste à la conquête de la Jamaïque par les bourgeois anglais nantis et prêts à tout pour obtenir un confort de vie au détriment de celle de populations arrachées à leurs racines. On assiste ainsi à la violence des traitements infligés aux esclaves mais c’est surtout la psychologie des « backras » qui intéresse ici puisque le personnage de Doug, fervent opposant à son père Elias sur cette question, tente de faire bouger les choses. Et ce n’est effectivement pas du luxe quand on liste les reproches que l’on peut faire à ces maîtres inhumains : punition au fouet, pendaison, viol, pédophilie…  Doug et Nora incarnent alors le désir de changement vers une plus grande humanité et un plus grand respect mais il est difficile d’affronter la majorité, d’autant que les regards portés sur eux des populations si longtemps exploitées restent méfiants. Sarah Lark en profite d’ailleurs pour rappeler que nombre d’esclaves envoyés dans le Nouveau monde avaient déjà ce statut en Afrique puisque l’esclavage n’est pas qu’un problème de blancs et de noirs. Il existait également des tribus africaines qui le pratiquaient avec leurs semblables. C’est d’ailleurs une question importante qui divise, dans le roman, les quelques esclaves qui parviennent à fuir les plantations pour ce qu’ils pensent être un « monde meilleur ». Autre petit détail culturel : la peinture des croyances africaines avec des références aux pratiques magiques et notamment aux « hommes et femmes obeah » ou aux « duppies », les fantômes ou les esprits censés pouvoir influer sur les destinées en Jamaïque.

A l’instar des personnages de Kathleen ou de Lizzie des Rives de la terre lointaine, Nora nous apparaît comme une héroïne de choc. Décidée à fuir l’Angleterre pour oublier la mort de son premier amour et retrouver son âme là où ils rêvaient de passer leur vie ensemble, elle se révèle d’un mental et d’une force admirables face aux péripéties qu’elle doit surmonter. On admire sa détermination et sa foi en des valeurs plus humanistes que chrétiennes, valeurs auxquelles elle ne renoncera pas même lorsqu’elle se verra attaquée et rabaissée par ceux qu’elle avait auparavant toujours protégés. On aime également ses capacités d’adaptation qui vont jusqu’à lui attirer l’admiration de ses oppresseurs. Là encore, on réalise combien le statut de femme, tant dans le monde des blancs que des noirs, se révèle quasi similaire. La femme est là pour satisfaire, dans tous les sens du terme, aux plaisirs des hommes : l’un y voit une manière d’afficher sa réussite, un autre sa virilité et sa vigueur sexuelle. On regrette qu’encore aujourd’hui ce genre de mentalités subsistent chez certains dans notre société. En cela, on retrouve quelques échos dans la deuxième partie de l’ambiance du roman d’Amy Belding Brown, L’envol du moineau même si ce dernier se révèle nettement plus littéraire que le roman de Sarah Lark.

Seul petit bémol pour moi : la fin qui manque, selon moi, d’envergure et de dimension dramatique, mais d’autres apprécieront sans aucun doute. Une chose est sûre : on peut déjà deviner à quels personnages sera consacrée la suite de cette saga et cela s’annonce pas mal du tout selon moi.

Mon chouchou à moi

Le personnage de Mama Awe qui, bien que personnage secondaire, n’en reste pas moins attendrissant.

En définitive, une nouvelle saga à découvrir et à suivre même si moins ambitieuse pour le moment que celle de la Trilogie Maorie.

Sarah Lark, L’île aux mille sources, Editions de l’Archipel, 2019

 

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